To be or not to be un influenceur quand on est médecin ? 

Influenceur : concept non défini juridiquement, mais qui existe bel et bien dans le monde marketing.

Se dit d’une personne qui par son exposition ou son réseau, influence ses “followers” par la diffusion de contenu qui peut être en lien (ou pas) avec son exercice professionnel. La notion d’influence est souvent liée à la e-réputation qui doit être soit bonne soit mauvaise, pour générer du trafic.  

On l’a déjà évoqué dans notre article « Un médecin peut-il promouvoir un acte médical sur les réseaux sociaux », les médecins ont peu à peu investi les réseaux sociaux ou autres plateformes d’expression pour promouvoir les actes médicaux qu’ils réalisent dans le cadre de leur activité et en particulier en médecine esthétique. Pour autant, ils doivent veiller à ce que leur réputation reste en conformité avec les principes déontologiques de la profession. 

Comment traduit-on ceci pour ce qui est de l’influence ?  

L’influence d’une personne est le résultat d’une stratégie marketing digitale qui peut être liée à l’exercice professionnel. Ou pas du tout. Un influenceur dans le domaine de la cuisine ou du sport, peut également être un médecin.  

Que se passe-t-il alors pour le médecin qui est influenceur ? Est-ce qu’il peut ou pas aborder des sujets médicaux ? Comment doit-il communiquer ?  

Les règles applicables en matière de communication pour les médecins n’ont pas évolué aussi vite que s’est développé ces phénomènes d’influence marketing. Les règles classiques applicables à la publicité restent donc applicables. On vous a fait un récapitulatif pour que vous les ayez bien en tête si vous décidez demain de vous lancer à la conquête de Tik Tok.  

Présence sur les réseaux sociaux et règles déontologiques générales  

Si le médecin “influenceur” peut communiquer en son nom sur les réseaux sociaux à titre éducatif, scientifique ou sanitaire sur sa pratique (article R. 4127-13 du Code de la santé publique), il ne peut en aucun cas faire un usage publicitaire de son nom, de sa qualité ou de son activité professionnelle (article 4127-20 du Code de la santé publique). Il doit ainsi refuser que les organismes auxquels il prête son concours utilisent à des fins commerciales son nom ou son activité professionnelle, surtout lorsque les procédés utilisés sont de nature à faire considérer l’exercice de la médecine comme un commerce.  

Si comme Dr Michel Cymès ou Dr Patrice Pelloux, un professionnel de santé peut réaliser des chroniques, des interviews, … via les médias traditionnels ou les réseaux sociaux, il doit vérifier le caractère d’intérêt général de l’information transmise ainsi que sa qualité. Mais aucune indication sur son cabinet ou son exercice n’est en principe tolérée par le conseil de l’ordre des médecins. À partir de là, cette règle devrait être applicable via n’importe quel type de média y compris les stories publiées sur Instagram (et disponibles uniquement 24h).  

En outre, lorsqu’un médecin “influenceur” recommande des publications (recherches, articles de médecins, …) sur un site, il doit veiller de la même manière à l’indépendance éditoriale de ce site. Il peut évoquer des recherches ou études en cours en précisant le caractère inabouti de celles-ci.  

  • Présence sur les réseaux sociaux et secret professionnel  

Le médecin “influenceur” peut communiquer tout en veillant à respecter l’anonymat de ses patients afin de respecter le secret professionnel qui est général et absolu et dont même le consentement du patient ne peut délier le praticien.  

Ainsi, s’il évoque des situations rencontrées en consultations comme le Juan-David Nasio sur France Inter, il doit donner un pseudonyme à ses patients et veiller à ce que les personnes en question ne soient pas identifiables via les informations transmises au public.  

En cas de communication via images sur les réseaux sociaux comme Dr Beauty sur Instagram, il convient de vérifier que ni la fixation ni la diffusion de l’image ne rend pas la personne reconnaissable. Il doit être impossible de discerner ses traits ou signes distinctifs.  

  • Présence sur les réseaux sociaux et devoir d’indépendance du médecin  

Le médecin “influenceur” ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit selon l’article R. 4127-5 du Code de la santé publique. Ce principe déontologique fonde la confiance du patient et a pour corollaire la responsabilité personnelle du professionnel de santé. 

À cet égard, tout contrat entre un médecin et une entreprise dans le cadre d’activités de recherches ou d’évaluation scientifique, doit être soumis pour avis à l’Ordre, qui contrôle l’adéquation à la charge de travail de la rémunération afin de veiller à l’absence d’orientation des prescriptions.  

En ce qui concerne les liens avec des entreprises produisant ou exploitant des produits de santé, les professionnels de santé sont tenus de les faire connaître au public lorsqu’ils s’expriment sur les produits en question publiquement (article L. 4113-13 du Code de la santé publique).  

  • Présence sur les réseaux sociaux et obligation de transparence du médecin 

Depuis la loi du 29 décembre 2011, le législateur a renforcé le contrôle en la matière par une obligation de déclaration par les entreprises de leurs liens avec les professionnels de santé lorsqu’elles : 

  • produisent ou commercialise des produits de santé ; 
  • produisent ou commercialisent des produits cosmétiques et de tatouage, ainsi que des lentilles non correctives ; 
  • ont des prestations associées en lien avec ces produits de santé.  

Ladite déclaration est obligatoire que le médecin soit rémunéré sur la base d’un contrat, d’avantages en nature ou espèce, ou encore de rémunération.  

Dans tous les cas, un médecin peut être amené à répondre devant les juridictions disciplinaires, de tous ses actes dès l’instant où il a fait usage de sa qualification, même si ceux-ci ont été commis en dehors de son exercice professionnel (article R. 4127-31 du Code de la santé publique). Deux conseils donc pour celui qui décide de se lancer dans l’influence pour compléter son revenu : en fonction de sa publication, vérifier s’il souhaite mettre en avant (ou pas) sa qualification professionnelle et de toujours bien vérifier à protéger sa e-réputation.  

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