En juillet 2023, la caisse nationale d’assurance maladie (« CNAM ») publie son rapport « charges et produits 2024 » et analyse le phénomène de « financiarisation » de la médecine en France.
Elle prend acte de la progression et propose la mise en place de nouveaux outils pour mieux la réguler.
Elle définit ce phénomène comme celui d’un « transfert de propriété de l’offre de soins privée des acteurs professionnels vers des acteurs financiers ».
Plus concrètement, elle vise l’arrivée de capitaux investis par des fonds d’investissements dans des structures autrefois détenues intégralement par les professionnels de santé, dans le but d’obtenir un retour sur investissement.
Le phénomène n’est pas nouveau, il a déjà touché les laboratoires d’analyse et les cabinets de radiologie. Nous vous en avions également parlé dans le domaine de la e-santé (« e-santé : eldorado des investisseurs ? »). Ce qui est nouveau, c’est que désormais ce sont les activités de soins qui sont concernées.
Il se produit également car ces activités de soins sont des activités rentables et parce que les infrastructures nécessaires pour la réalisation de ces actes coûtent de plus en plus chers, et que les professionnels de santé, peu aguerris à la gestion d’entreprise, ont des difficultés à développer leur activité, sans l’arrivée de ces flux externes.
D’autant que ces flux externes arrivent bien souvent avec un apport en compétence sur la gestion d’entreprises tant financière que managériale.
Les professionnels de santé sont d’autant plus réceptifs que les praticiens d’aujourd’hui préfèrent souvent être salarié qu’indépendant, ne cherchant pas à s’embêter avec le poids des responsabilités.
L’absence de données tangibles sur un sujet aussi opaque rend l’analyse de la CNAM compliquée. Toutefois, elle apporte une réflexion sur le résultat de ce phénomène, à savoir le transfert de propriété.
Parmi les mesures proposées, la CNAM propose la mise en place d’un observatoire pour suivre les opérations financières et analyser leur conséquence. La confidentialité qui caractérise ses opérations rend difficilement imaginable la pertinence de l’exercice.
La CNAM propose également de créer une mission interministérielle de contrôle, afin de renforcer la capacité des pouvoirs publics à faire respecter le cadre juridique qui s’applique aux offreurs de soins de droit privé. Pour rappel, les professionnels de santé sont des professionnels réglementés, i.e. ils sont soumis à une législation spécifique dans l’exercice de leurs fonctions.
Ce rapport fait l’objet d’une analyse par Daniel Benamouzig et Yann Bourgueil dans une note publiée par la Chaire Santé de Sciences Po en juillet 2023.
Pour aller plus loin, vous pouvez également écouter : « La santé doit-elle être en dehors des lois du marché », une émission proposée par France Culture le mercredi 17 janvier 2024.
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