L’obligation de loyauté du dirigeant d’une société est une création jurisprudentielle (Cour de cassation, chambre commerciale, 27 février 1996, Vilgrain, n°94-11.241). Initialement prévue comme une obligation lors de la cession de titres d’une société, cette obligation s’est élargie à d’autres domaines et aux différentes formes de société.
En effet, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que l’obligation de loyauté et de fidélité pesant sur le dirigeant d’une SARL lui interdit, en la qualité de gérant d’une autre société, de négocier un marché dans le même domaine d’activité (Cour de cassation, chambre commerciale, 15 novembre 2011, n°10-15.049).
Cependant, cette interdiction est limitée car elle autorise tout de même ce dirigeant à exercer une activité concurrente de la SARL dont il est dirigeant, sans pour autant en avoir l’obligation d’informer les autres associés (sauf dispositions statutaires ou contractuelles contraires).
Cette jurisprudence a ainsi ouvert à la porte à l’insertion de garde-fous statutaires pour les associés qui souhaitent se prémunir contre toute activité anti-concurrentielle intra-associés.
Le 28 décembre 2012, la chambre commerciale de la Cour de cassation est allée plus loin dans une affaire où un médecin avait acquis un immeuble sans informer les autres associés qui projetaient de l’acquérir pour la société d’exercice professionnelle au sein de laquelle ils exerçaient ensemble. Les juges ont estimé que l’obligation de loyauté du dirigeant au sein d’une SAS oblige ce dernier à informer les associés d’une opération effectuée à titre personnel qui a des incidences sur la société.
Plus récemment, la Cour est venue préciser que dans le cadre d’une SARL, les dirigeants sociaux sont tenus d’informer la société de leur participation à la création d’une entreprise concurrente au nom du principe de loyauté. En cas de manquement, la responsabilité du dirigeant peut être engagée afin d’obtenir réparation de l’entier préjudice subi au titre de ce manquement (Cour de cassation, chambre commerciale, 21 septembre 2022, n°20-20959).
Cette décision se fonde sur l’article L. 223-22 du Code de commerce qui prévoit que le gérant peut être tenu responsable envers la société lorsqu’il commet des manquements aux dispositions législatives, réglementaires ou statutaires.
Seule solution pour éviter de voir sa responsabilité engagée tout en continuant d’investir : l’accord unanime des associés pour qu’un dirigeant puisse exercer une activité concurrente (Cass, com, 18 mars 2020, n°18-17.010).
S’inscrivant dans le courant des « principles of corporate governance » américains, l’obligation de loyauté vient ajouter des contraintes au dirigeant d’une société mais également du pouvoir aux organes dirigeants de la société qui peuvent accroître comme limiter la portée de ce principe.
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